LES VOIES DE CONTAMINATION BIOLOGIQUE ET DE PROLIFERATION NOCIVE DANS LA CHAINE ALIMENTAIRE
par Roland Rosset
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Chaque rapporteur de notre colloque a livré avec soin des informations claires sur la tranche qui lui était impartie, annoncées dans un sommaire et terminées par des conclusions précises. Il n'est pas question maintenant de reprendre ces conclusions mais il nous semble bénéfique de regrouper les principaux points en une synthèse appropriée. Nous les exposerons sous les titres suivants :
1. Les chaînes alimentaires
2. Les agresseurs biologiques: nature et comportement
3. La prévention
4. Des motifs de satisfaction
5. Une vigilance à maintenir
6. Des consommateurs fragiles et des aliments sensibles, voire dangereux
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LES CHAINES ALIMENTAIRES
Sous cette dénomination on doit, en fait, distinguer deux concepts différents et parIer de "chaîne biologique" et de "chaîne mécanique".
La chaîne alimentaire "biologique" concerne la migration des nutriments et celle des toxines élaborées par des microorganismes (microalgues, bactéries,...) transférées successivement à des mollusques et à des poissons herbivores (poissons brouteurs des récifs coralliens) puis à des poissons carnivores eux-mêmes mangés in fine par des hommes. Les toxines sont acceptées par les premiers consommateurs successifs sans le moindre trouble et elles ne manifestent leurs effets que chez le dernier, l'homme, pour lequel elles sont particulièrement agressives entraînant des accidents diarrhéiques ou nerveux, souvent graves. Cette chaîne biologique concerne les biotoxines marines dont les études récentes ont permis de préciser l'origine et le cheminement. Leur nature et leur processus d'action, longtemps ignorés, ont été dévoilés et désormais on a éclairé l'étiologie des divers syndromes liés à l'ingestion de coquillages et de poissons de parfaite fraîcheur mais de consommation périlleuse voire exceptionnellement mortelle (ciguatera, fugu...). Cette connaissance permet aujourd'hui de protéger les consommateurs en organisant des réseaux de surveillance et en appliquant une réglementation rigoureuse comportant une inspection précise.
Cette chaîne biologique est par ailleurs à considérer pour d'autres polluants, notamment pour les métaux lourds accumulés par les poissons.
La chaîne alimentaire "mécanique" ou simplement la chaîne alimentaire et son exemple typique, la "chaîne du froid". Cette chaîne se rapporte aux déplacements des denrées depuis leur lieu de récolte ou de production jusqu'au lieu de leur consommation. Les étapes successives constituent les maillons de la chaîne, à savoir: transformation (première, deuxième, troisième transformation), stockage, transport, nouveau stockage, répartition, conditionnement, emballage, distribution, consommation. On est ainsi bien loin du "circuit" court d'autrefois où un seul professionnel (fermier, laitier, boucher...) remplissait toutes ces tâches. Il est évident que lors du cheminement de la denrée, les occasions de contaminations et de multiplications microbiennes ne manquent pas, aussi toutes précautions doivent être prises pour les éviter. C'est ce que nous signalerons au cours du chapitre relatif à l'hygiène des aliments.
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LES AGRESSEURS BIOLOGIQUES: NATURE ET COMPORTEMENT
Six catégories de contaminants d'origine biologique alimentaire ont été examinées :
1 les prions
2 les catabolites toxiques
3 les toxines (mycotoxines, biotoxines, botuliques)
4 les parasites et les protozoaires
5 les virus
6 les microorganismes
- responsables de toxi-infections alimentaires classiques
- agents pathogènes non entériques (BK, Brucella, Listeria).
Ces contaminants peuvent être classés en fonction de leur comportement, classification qui permettra d'orienter la prévention :
1. Contaminants biologiques pathogènes, en général non évolutifs dans l'aliment
1.1. Composés inertes: ils provoquent des intoxications chroniques ou aiguës.
Mycotoxines, biotoxines, catabolites toxiques.
1.2. Contaminants vivants, de structure complexe. 'Virus, prions.
2. Contaminants biologiques pathogènes évolutifs :
2.1. Parasites, évolutifs chez l'hôte. Gardia, Lamblia, Amibes, Protozoaires et leurs kystes. 2.2. Microorganismes pathogènes se mulipliant dans l'aliment ou chez l'hôte et pouvant aboutir à la présence d'un nombre important d'unités :
2.2.1. Multiplication dans l'aliment:
2.2.1.1. Germes divers, notamment: Salmonella, Campylobacter, Clostridium perfringens, Staphylococcus aureus, Listeria monocytogenes, Pseudomonas, Escherichia coli pathogènes.
2.2.1.2. Germes libérant des toxines sources d"intoxinations", aliment dit porteur de toxines préformées:
- toxines thermo-résistantes élaborées par Staphylococcus aureus, - toxines thermo-labiles élaborées par des germes divers (Bacillus cereus, Yersinia enterocolitica, Clostridium botulinum)
2.2.2. Multiplication dans l'intestin de l'hôte, avec ou sans libération de toxines (germes dits invasifs ou vérotoxiques). Très nombreux germes: Salmonella, Shigella, Escherichia coli entérotoxinogènes, E. coli entérohémorragique, E. coli 0157 H7, Vibrio cholerae, Yersinia enterocolitica, Campylobacter, Aeromonas,...
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LA PREVENTION
Théoriquement simple, elle est multiple dans ses applications et concerne tout particulièrement une protection contre les microorganismes; elle constitue le grand chapitre de l'hygiène des aliments.
Sans l'examiner en détail, rappelons ses grands principes schématisés dans la "formule" de l'hygiène :
Ces principes sont à mettre en oeuvre à chaque maillon de la chaîne alimentaire :
+ : Limitation des apports microbiens :
1. Matières premières: choix, contrôle
2. Matériel, équipement: conception, nettoyage et désinfection
3. Méthodes: process
4. Milieu environnant: extérieur, intérieur; protection contre les animaux et leurs matières fécales (mouches, oiseaux, rongeurs,...)
5. Manipulateurs: souillures par les mains, formation, HACCP
X : Ralentissement de la croissance microbienne. Le recours à 7 moyens :
1. Abaissement du pH
2. Modification de l'atmosphère par conditionnement adapté (atmosphère conditionnée, gaz carbonique, vide; conditionnements actifs)
3. Inhibition de la croissance microbienne par recours à des composés chimiques conservateurs (liste limitative)
4. Concurrence microbienne favorisée (études écologiques, ajouts de microorganismes probiotiques bénéfiques, au rôle compétitif)
5. Abaissement de la disponibilité de l'eau en jouant sur l'A w (dessiccation, sel, sucre, carraghénates, congélation)
6. Abaissement de la température de conservation (réfrigération rapide, continue, basse)
7. Limitation de la durée de conservation (DLUQ, DLC).
- : Destruction des éléments pathogènes (formes végétatives, spores, toxines).
Recours à des moyens :
1. mécaniques: filtration, ultrahaute pression
2. physiques: chaleur, ionisation
3. chimiques: bactéricides, additifs autorisés