Les lois alimentaires juives

 La cacherout

Par le Docteur Bruno FISZON

Grand Rabbin de Metz et de la Moselle

 

Introduction

Le rŽcit biblique de la CrŽation sÕarticule autour de la naissance du premier homme. La  Bible ne se prŽsente pas comme un livre dÕhistoire ou de science, mais comme un projet pour cet homme. Les dŽbats passionnŽs sur les contradictions entre le rŽcit de la Gense et les documents scientifiques apparaissent aujourdÕhui dŽpassŽs. Prendre le texte biblique ˆ la lettre et dŽmontrer son incohŽrence scientifique semble tre une dŽmarche erronŽe. Face ˆ lÕapparition des thŽories de lՎvolution et des donnŽes scientifiques sur lÕanciennetŽ du monde, certains ma”tres du juda•sme nÕavaient pas hŽsitŽ ˆ affirmer que cela ne remettait pas en cause la vŽracitŽ du Texte de la Torah. Les jours bibliques pouvaient parfaitement correspondre ˆ des pŽriodes gŽologiques !

La science pose la question COMMENT ? La religion sÕintŽresse au POURQUOI ? La Torah (les 5 premiers livres de la Bible, ou Pentateuque) considre lÕhomme comme le couronnement de la CrŽation et sÕadresse ˆ lui pour lui proposer un modle de vie.
Dans ce chemin Žthique, lÕhomme doit dŽfinir sa place dans la CrŽation. PlacŽ au sommet de la cha”ne alimentaire, il doit concevoir une relation harmonieuse avec lÕensemble des crŽatures et en particulier lorsquÕil sera amenŽ ˆ les consommer. LÕacte de sÕalimenter est un geste trs basique, que nous partageons avec lÕensemble du monde vivant (comme lÕest lÕailleurs lÕacte de se reproduire). La Torah nous propose de rglementer cet acte. Celui qui sÕy soumettra tentera de vivre un acte trs animal comme un geste Žminemment humain au sens noble du terme ; manger peut aussi obŽir ˆ une certaine Žthique !

RŽgime alimentaire idŽal et rŽgime carnŽ

Adam le premier homme du rŽcit biblique Žtait vŽgŽtarien. Ē LÕEternel dit : Voici, je vous donne toute herbe portant de la semence et qui est ˆ la surface de toute la terre, et tout arbre ayant en lui du fruit dÕarbre et portant de la semence : ce sera votre nourriture Č. (Gense I, 29, Pentateuque 1978).

Ainsi lÕanimal, crŽature divine, Žtait prŽservŽ dans son existence et lÕhomme Žtait censŽ de par son alimentation vŽgŽtale demeurer un tre pacifique dŽpourvu de violence. Ē La terre fut corrompue, devant lÕEternel et la terre fut emplie de violence Č (Gense VI, 2, Pentateuque 1978). LÕEternel dŽcida dÕeffacer cette humanitŽ pour tenter une nouvelle histoire ˆ partir de NoŽ. Cet homme et sa famille furent choisis pour leurs vertus. Ils seront source dÕune nouvelle humanitŽ et chargŽs de sauver lÕensemble des espces animales gr‰ce ˆ lÕArche ! Toutefois, cette nouvelle Gense sÕaccompagna dÕune profonde modification du rapport entre lÕhomme et les animaux. LÕEternel autorisa ds lors la consommation de la chair animale. Ē Tout ce qui remue et qui vit vous servira de nourriture, comme lÕherbe verte, Je vous ai donnŽ tout cela Č (Gense IX, 3 Pentateuque 1978).

DÕaprs le Ma”tre Don Isaac Abravanel (Espagne, Italie, 1438 Š 1508) dans son commentaire sur ce verset. Le vŽgŽtarisme Žtait lÕidŽal, mais lÕEternel a fait lˆ une concession ˆ la faiblesse de lÕhomme car il y a eu dŽgradation des valeurs morales de lÕhumanitŽ (Munk 1978).

Ma•monide, le cŽlbre Rabbin, philosophe et mŽdecin mŽdiŽval (1135-1204) explique que les animaux ont du leur salut ˆ lÕhomme, NoŽ, qui les a sauvŽs du dŽluge et par consŽquent il peut en disposer ˆ son grŽ (Ma•monide, Guide des EgarŽs 1963).

Le commentateur Ibn Ezra explique quÕavant le dŽluge, les hommes se sont comparŽs aux animaux et ont considŽrŽ quÕils nՎtaient pas responsables de leurs actes car ils suivent leur instinct naturel. Cette mentalitŽ fut ˆ lÕorigine mme de la perversion de lÕhumanitŽ et de sa destruction par les eaux du dŽluge. Ainsi en permettant ˆ lÕhomme de mettre ˆ mort lÕanimal pour le manger, la Torah Žtablit une hiŽrarchie. Certes les animaux sont des crŽatures divines mais lÕhomme crŽŽ ˆ lÕimage du Tout Puissant doit rester sans conteste en haut de la Ē pyramide de la vie Č (Torah 2004).

Rabbi MochŽ Cordovero, dans son ouvrage Tomer Debora, dans le mme ordre dÕidŽes, explique Ē lÕUnivers tout entier ressemble ˆ un Temple o tout chante la gloire du Seigneur Č. Sur tous les degrŽs de lՎchelle qui mne des profondeurs de la vie aux rŽgions les plus sublimes de lÕEsprit, tous les ŽlŽments aspirent vers les cimes et cherchent ˆ se rapprocher de la source divine sacrŽe dÕo Žmanent la vie et la bŽnŽdiction. Il existe en effet dans la nature un ordre hiŽrarchique qui sՎtend jusquÕaux ŽlŽments organiques diffŽrenciŽs selon la mesure de la vitalitŽ quÕils reoivent de la source suprme de lumire Č (Munk, 1978).

Ainsi la consommation de nourriture relie lÕhomme ˆ son milieu et lui donne un sens. Le type de relation avec les aliments traduit sa place et son rapport dans lÕunivers. Le rgne vŽgŽtarien nÕa pas permis lՎlŽvation de lÕhomme, il faut donc une nouvelle pŽdagogie : lÕalimentation carnŽe. LÕhomme, en consommant les tres infŽrieurs, les intgre et Žlve lÕensemble de la crŽation vers sa source cŽleste.

Bien Žvidemment ce projet, aussi spirituel soit-il, ne peut sÕaccomplir quÕavec des rgles trs strictes et trs prŽcises qui permettent ˆ lÕhomme de transformer lÕacte banal de manger de la chair animale en un geste spirituel et pŽdagogique.

 

RŽgime carnŽ et respect de lÕanimal

La possibilitŽ de manger de la viande nÕautorise pas lÕhomme ˆ disposer sans aucune limite des crŽatures du monde vivant.

Il a tout dÕabord lÕobligation de prŽserver le monde dans lequel il Žvolue. Ē LÕEternel plaa lÕhomme dans le jardin dÕEden pour le travailler et le garder Č (Gense II,  15, Pentateuque 1978) Il ne doit pas dŽtruire lÕoeuvre de la crŽation ! Une loi juive trs particulire illustre cette Ē volontŽ Žcologique du Texte biblique Č.

Un homme rencontre en chemin un nid dÕoiseaux. Une femelle veille sur ses Ļufs ou ses oisillons, et elle appartient ˆ une espce permise ˆ la consommation. LÕhomme pourra se saisir des Ļufs et des oisillons ˆ condition de renvoyer la mre, permettant ainsi ˆ lÕespce de se perpŽtuer ! (HalŽvy A. 1240)

Parmi les rgles de comportement vis-ˆ-vis des animaux, le juda•sme pr™ne lÕexclusion de toute cruautŽ.

Ainsi sÕexprime le Texte biblique. Ē Toutefois la chair, tant que son sang maintient sa vie, vous nÕen mangerez pas Č (Gense IX, 4 Pentateuque 1978). Pour le Rabbi Salomon fils dÕIsaac de Troyes (Rachi, 1040-1105), la consommation dÕun membre dÕun animal encore vivant est illicite et relve dÕune grande cruautŽ. Cette prescription fut ordonnŽe ˆ NoŽ au lendemain du dŽluge et sÕadresse donc ˆ lÕensemble de lÕhumanitŽ.

Il existe une forme ŽlevŽe de compassion pour lÕanimal et une prise en considŽration de sa souffrance dans le juda•sme. De nombreuses lois interdisent cette souffrance, appelŽe par le terme hŽbra•que Tsaar BaalŽ Hayim. Pour le Rabbi MochŽ Isserless (1520-1573, Cracovie). La mise ˆ mort dÕun animal ne serait permise que dans le cas de sa consommation et ou de son utilitŽ au niveau mŽdical (Weill E. Choulhan Arouh 1975).

Ainsi chasse ou tauromachie nÕont pas leur place dans lÕunivers dÕun juif pratiquant. Quelques autres lois illustrent cette pensŽe (liste non exhaustive).

Ē Il est interdit ˆ un homme de manger toute nourriture avant dÕavoir nourri ses animaux ; dit le Talmud de Babylone (TraitŽ Berahot 40a).

Le Chabbath, jour de repos, sÕimpose aussi aux animaux Ē Tu ne feras aucun travail, toi, ton fils, ta fille, ton bŽtailÉ Č (Exode XX, 10,  (Pentateuque 1978).

Ē Un homme doit conna”tre lՉme animale Č (Proverbes XII, 10).

Le Rabbin Eliya de Vilna explique : il ne doit pas le nourrir plus que de mesure ni lui imposer un labeur au-delˆ de ses forces (Eliya de Vilna, 1770).

Ē Gros ou petit bŽtail, vous nՎgorgerez pas lÕanimal avec son petit le mme jour Č (LŽvitique XXII, 48, Pentateuque 1978).

Ma•monide considre quÕil existe un instinct maternel chez lÕanimal proche de celui de la femme (Ma•monide, Guide des EgarŽs III, 48)

Ē Ne muselez pas le bĻuf pendant quÕil foule lÕherbe (DeutŽronome XXV, 4, Pentateuque 1978).

LÕabattage rituel lui-mme a pour but de limiter la souffrance animale  (Halevi A. 1240). Ce dernier point fera lÕobjet dÕun dŽveloppement particulier.

Il existe mme une sanction pour un acte de cruautŽ envers lÕanimal (Hechassid Y. 1200).

 

 

Les animaux permis et interdits

 

En prŽambule, il est remarquable de constater comment les anciens HŽbreux, gr‰ce aux enseignements bibliques savaient classer les animaux par critres anatomiques avant mme les premires classifications scientifiques (Gense I, 24, Pentateuque 1978).

 

Ē Les tres animŽs sont crŽŽs selon leur espce Č. Le livre du LŽvitique, troisime ouvrage du Pentateuque au chapitre XI Žnonce les grandes catŽgories animales et distingue quatre catŽgories :

-       les animaux terrestres (assimilables aux mammifres)

-       les animaux aquatiques

-       les animaux aŽriens (les oiseaux)

-       les animaux qui se meuvent sur le sol (reptiles, batraciens, invertŽbrŽs) (LŽvitique XI, Pentateuque 1978).

 

a) Les mammifres

 

ĒVoici les animaux que vous pouvez manger parmi toutes les btes qui vivent sur terre : tout ce qui a le pied cornŽ et divisŽ en deux ongles parmi les animaux ruminants, vous pouvez les manger Č. (LŽvitique XI, 1 ˆ 8, Pentateuque 1978).

Ainsi pour les mammifres, deux critres sont indispensables pour quÕun animal soit dŽclarŽ cacher (= apte ˆ tre consommŽ).

-       Etre un ongulŽ portant deux doigts chaussŽs de sabots

-       Etre ruminant.

Dans le DeutŽronome, le lŽgislateur Mo•se dresse une liste (non exhaustive) de 10 animaux qui rŽunissent les deux conditions. Leur traduction et identification peuvent toutefois prter ˆ interprŽtation : le bĻuf, la brebis, la chvre, le cerf, le chevreuil, le daim, le bouquetin, lÕantilope, lÕauroch et le zemer (DeutŽronome XIV, 4 et 5, Pentateuque 1978).

Chaque espce en fait reprŽsente une famille, ainsi, sous le vocable bĻuf, il faut comprendre tous les bovins  (bison, buffleÉ) DÕautres espces possdent les deux critres de cacherout sans tre citŽs, mais leur consommation se heurte ˆ des problmes techniques (on ignore ˆ quel niveau du coup de la girafe doit-on effectuer lÕabattage rituel).

        

La connaissance des ma”tres du Talmud en zoologie Žtait remarquable. Ainsi sÕexprime le Talmud : Ē Le Ma”tre du Monde sait quÕil nÕy a pas un ruminant qui ne soit pas onguligrade, sauf le chameau et il nÕy a pas un onguligrade au pied fourchu qui ne rumine pas, sauf le porc, et cÕest pour cela que la Bible les a citŽs Č (Talmud de Babylone Houlin 59a).

Ainsi lÕinterdiction du porc est donc citŽe nominativement.

Cet interdit nÕest en aucun cas plus grave que dÕautres (cheval, lapin) comme certaines croyances populaires les vŽhiculent, mais est citŽ ˆ titre dÕexemple de la profonde connaissance des Rabbins en la matire et ce depuis les premiers sicles de notre re. Ils ajoutent mme dans ce traitŽ dÕautres critres anatomiques ; comme lÕabsence dÕincisives ˆ la m‰choire supŽrieure et la prŽsence de cornes, permettant de sÕaffranchir de la recherche des critres Ē ruminants Š sabots fendus Č pour autoriser un animal ˆ la consommation (Dor. M.  1956).

 

 

b) Les animaux aquatiques

 

Ē Voici ce que vous pouvez manger des divers animaux aquatiques : tout ce qui est dans les eaux, mers, rivires et pourvu de nageoires et dՎcailles, vous pouvez en mangerÉ Č

Ainsi sont exclus tous les invertŽbrŽs : mollusques, crustacŽs et autres fruits de mer.

Le code de loi appelŽ Choulhan Harouh, rŽdigŽ par le Rabbi Yossef Caro (1488-1575)  (Ē La table dressŽe Č) prŽcise les critres anatomiques des poissons autorisŽs (outre la prŽsence dՎcailles et de nageoires).

-       PrŽsence dÕune colonne vertŽbrale

-       Ecailles mme fines mais visibles ˆ la lumire

-       Īufs Žmis au moment du frai non embryonnŽs

-       Vessie natatoire pointue dÕun c™tŽ et obtuse de lÕautre.

 

Pour le Docteur Pargamin, Ē ces critres permettent de classes les poissons parmi les Teleosteens, poissons osseux et actinoptŽrygiens pourvus dÕun squelette compltement ossifiŽ et dÕun corps recouvert dՎcailles Č. Un grand nombre dÕespces sont permises. Parmi les espces interdites les plus courantes : requin, raie, baudroie, anguille, lamproie, turbotÉ

Les poissons nÕont pas ˆ subir dÕabattage rituel. Ils doivent tre simplement sortis de lÕeau vivants.

 

c) Les oiseaux

 

La Torah ne donne pas de critre anatomique pour distinguer les oiseaux cachers, mais donne une liste de 24 animaux prohibŽs (Levitique XI, 13 ˆ 19,  Pentateuque 1978).

Citer cette liste serait inutile car les traductions semblent pour beaucoup trs alŽatoires.

Le Talmud Žtablit plus tard des caractŽristiques plus claires (Talmud de Babylone TraitŽ Houlin 65a 1882).

 

-       Ne pas tre un oiseau de proie

-       PrŽsence dÕun jabot (zephek en hŽbreu), soit un diverticule de lÕĻsophage avant quÕil nÕentre dans la cage thoracique. Les aliments y sŽjournent un certain temps pour se ramollir

-       -PrŽsence dÕun gŽsier dont la tunique intŽrieure ou muqueuse se dŽtache facilement de la musculeuse (caractŽristique des granivores et des non carnivores).

-       Existence dÕun doigt supplŽmentaire ou ergot. Il faut ajouter quÕil doit exister une tradition que lÕoiseau a toujours ŽtŽ considŽrŽ comme permis. (Shapiro D. 1930).

Ainsi sont consommables : poule, oie, canard, dinde, perdrix, caille, pigeon, pintade.

 

 

 

 

Autres animaux

 

Ils sont tous prohibŽs ˆ lÕexception de quatre espces de sauterelles Ē Tout insecte ailŽ qui marche sur quatre pattes sera immonde pour vous. Toutefois, vous pourrez manger parmi les insectes ailŽs marchant sur quatre pattes, celui qui a au-dessus de ses pieds des articulations au moyen desquelles il saute sur la terre, vous pourrez manger les suivants : lÕarbŽ selon ses espces, le solam selon ses espces, le hargol et le hagal selon leurs espces. Ces espces de sauterelles ou criquets sont bien difficiles aujourdÕhui ˆ identifier  (LŽvitique XI, 21-22 Pentateuque 1978).

 

Signification du choix des espces cachres

 

Ecartons dÕemblŽe les thŽories anciennes attribuant aux animaux interdits le statut dÕanimal sacrŽ ou de totem comme lՎcrit Reinach Ē Les Juifs pieux sÕabstiennent de manger du porc parce que leurs lointains anctres, 5 ou 6000 ans ans avant notre re, avaient pour totem le sanglier Č (Reinach 1909). Cette thŽorie est erronnŽe, car les lois alimentaires nÕinterdisent pas un animal en soi, mais Žnoncent des critres anatomiques et physiologiques qui Žcartent de vastes catŽgories du monde animal !

On pourra toutefois trouver dans le choix des espces des raisons pŽdagogiques. Les mammifres consommŽs sont tous de stricts herbivores dont la spŽcialisation dans ce rŽgime au cours de lՎvolution est amenŽe ˆ son summum. Mme parmi les oiseaux, les carnivores sont ŽcartŽs (oiseaux de proie). Le rŽgime alimentaire peut tre considŽrŽ comme ayant un impact sur le comportement. Ainsi lÕhomme est invitŽ ˆ des mĻurs pacifiques. Cette explication porte un certain nombre de faiblesses et on peut considŽrer que les lois alimentaires font partie de ce domaine du Hoq en hŽbreu. Ce terme dŽfinit des lois dont la raison Žchappe encore aujourdÕhui ˆ une explication rationnelle. La t‰che des Žrudits reste toujours de chercher ˆ en Žlucider le sens.

 

 

LÕinterdiction de la consommation du sang

 

La Torah interdit la consommation du sang des mammifres et des oiseaux : Ē Toutefois la chair, son ‰me est dans le sang Č  (Gense II, 4, Pentateuque 1978) Ē car lՉme de toute chair est dans le sang Č (LŽvitique XVII, 11, Pentateuque 1978) Ē car lՉme de toute chair cÕest son sang qui est dans son corps, aussi ai-Je dit aux enfants dÕIsra‘l : Ne mangez pas le sang dÕune crŽature Č (LŽvitique XVII, 14, Pentateuque 1978). Rachi, Rabbi Salomon Isaac de Troyes (1040-1105), le commentateur mŽdiŽval explique Ē son sang est le principe de vie, car la vie en dŽpend Č.

Comment comprendre ce terme ‰me appliquŽ ˆ lÕanimal. Le mot ‰me en franais est assez vague et regroupe en fait plusieurs notions diffŽrentes. La Nechama ou ‰me humaine en hŽbreu sÕidentifie au moi profond de lÕhomme et atteste de sa conscience humaine. Elle survit ˆ la mort physique, le Nefech ou ‰me animale est lui prŽsent chez toutes les crŽatures ŽvoluŽes et sÕapplique ˆ tout animal ayant un principe de vie organisŽ,  centralisŽ et possŽdant une certaine sensibilitŽ (vertŽbrŽ). Chez lÕanimal supŽrieur (HomŽotherme) le sang est le support du principe de vie ou Nefech. Si cette ‰me animale se distingue de lՉme humaine, elle mŽrite notre respect, ainsi le sang, son support matŽriel doit tre ŽcartŽ de notre consommation. Les mammifres sauvages (cerfs, daimsÉ) cachers et les oiseaux bŽnŽficient mme dÕune rgle supplŽmentaire. Aprs lÕabattage rituel le sacrificateur a lÕobligation de couvrir le sang ainsi rŽpandu avec du sable ou de la terre (Caro J., 1575 Choulhan Arouh YorŽ dŽa XXVII, 1).

DÕautre part, il serait aussi nŽfaste que lÕhomme ingre le sang porteur de lՉme animale pour rester symboliquement un tre supŽrieur qui ne confond pas son ‰me avec  celle des tres infŽrieurs.
Enfin, les retombŽes sanitaires de cette rgle sont bien connues. Le sang est porteur de toxines et constitue un excellent milieu de culture pour les microorganismes en tous genres.

LÕabattage rituel ou Shehita permet de rŽaliser une saignŽe importante. Il est complŽtŽ par un traitement de la viande par le sel (une demi-heure dans lÕeau, une heure dans le gros sel et rinage).

 

Autres interdits

 

Le nerf sciatique et toutes ses ramifications est interdit pour les mammifres. Ceci rŽsulte de la lutte de Jacob et de lÕange. Ē CÕest pourquoi jusquՈ ce jour les enfants dÕIsra‘l ne mangent pas le nerf sciatique qui est ˆ la hanche parce quÕil (lÕange) toucha ˆ lÕarticulation de la hanche de Jacob, le nerf sciatique Č (Gense XXXII, 32, Pentateuque 1978).

DŽvelopper les raisons symboliques de cet interdit dŽpasserait largement le cadre de cette Žtude. En Europe, les Žtablissements cachers pour des raisons pratiques ne commercialisent que les avants de lÕanimal. Les graisses de la partie arrire de lÕanimal sont interdites (heleve ou suif) car elles Žtaient bržlŽes sur lÕautel des sacrifices du Temple de JŽrusalem.

 

Enfin, le mŽlange de produits laitiers et carnŽs est strictement prohibŽ.

Ē Tu ne feras pas cuire un chevreau dans le lait de sa mre Č (Exode XXXIV, 26,  Pentateuque 1978). Selon lÕinterprŽtation de nos sages, il est interdit de rŽaliser mŽlange lait-viande, de le consommer ou dÕen tirer profit (Halevy A., 1240).

La symbolique dÕune telle loi sÕexplique par le refus de mŽlanger le lait, symbole de la vie (lÕaliment de base du nouveau-nŽ et la viande pour laquelle il a fallu donner la mort.

Certains diŽtŽticiens modernes prŽconisent la sŽparation de ces deux entitŽs.

 

 

 

Les bases religieuses de la shehitat ou abattage rituel

 

a) SOURCES

 

Le texte rŽvŽlŽ de la Torah fait obligation pour le peuple juif dÕutiliser la Shehitat comme le mode dÕabattage des animaux ˆ sang chaud dont la consommation est autorisŽe.

 

La source essentielle de lÕabattage rituel pour la consommation profane de viande se trouve dans le DeutŽronome : Ē Quand lÕEternel Ton D. aura Žtendu ton territoire comme Il te lÕa promis et que tu diras Ē je veux manger de la viande Č parce que tu auras envie de manger de la viande autant que tu auras envie (etcÉ) tu pourras tuer de la manire dont Je tÕai prescrite de ton gros et de ton menu bŽtail que tÕauras donnŽ lÕEternel, et du pourras manger dans tes portes autant que tu le dŽsireras Č (DeutŽronome (XII, 20, 21,  Pentateuque 1978).

 

Le TraitŽ du Talmud de Babylone Houlin 28a nous donne les impŽratifs techniques de la shehitat

-       Section de la trachŽe et de lÕĻsophage en majoritŽ pour els mammifres ruminants et les ongulŽs.

-       Section de lÕun de ces deux organes en majoritŽ pour les oiseaux.

 

b) LA TECHNIQUE DÕABATTAGE

 

Le sacrificateur ou Shohet

 

Tout homme majeur en pleine possession de ses facultŽs intellectuelles peut abattre rituellement (Talmud de Babylone TraitŽ Houlin 2a 1882)

Rabbi MochŽ Isserls (le Rema) (1520-1573) explique dans ses remarques que le Shohet (le sacrificateur) doit, malgrŽ ses connaissances thŽoriques impŽratives, se soumettre ˆ un examen devant un Sage qui lui dŽlivrera une Kabala ou autorisation dÕabattre liŽe ˆ ses connaissance et ˆ sa dextŽritŽ technique.

 

Un Shohet mme expŽrimentŽ doit t‰cher de rŽviser en permanence les enseignements thŽoriques de la shehitat.

 

Le shohet doit Žgalement rŽpondre ˆ des exigences morales et de fidŽlitŽ ˆ la Torah. On  ne pourra pas donner par exemple de Kabala ˆ un homme qui boit de lÕalcool plus que de mesure Ō (Caro J., 1572, Choulhan Arouh YorŽ DŽa 1, 1).

Le Tribunal rabbinique doit effectue des contr™les permanents de lÕaptitude des sacrificateurs. Toute faute peut entra”ner un retrait partiel de la Kabala, une faute morale entra”ne un retrait dŽfinitif.

 

Le couteau ou Halef

 

Les dimensions du couteau sont liŽes aux principes halakhiques. Ainsi pour permettre lÕ Ē aller-retour Č lors de la section, il possde deux fois la largeur du cou de lÕanimal. Son extrŽmitŽ est rectiligne ou arrondie, jamais pointue. Il est fait en un matŽriau solide (acier trempŽ).


Le TraitŽ du Talmud de Babylone, traitŽ Houlin 17b indique quÕil y a nŽcessitŽ de vŽrifier le couteau Ē il faut faire lՎpreuve du couteau sur ses trois c™tŽs (le fil et chaque face du fil) ˆ lÕaide du doigt et de lÕongle Č (Commentaire du Rabbi Salomon de Troyes).

 

Rachi explique dans son commentaire sur le Talmud traitŽ Houlin 17b, que si le couteau est ŽbrŽchŽ, les organes (trachŽe et Ļsophage) risquent dՐtre accrochŽs par lՎbrŽchure et arrachŽs de leur insertion. Tout animal abattu avec un couteau qui se sera rŽvŽlŽ ŽbrŽchŽ (mme aprs abattage) est impropre ˆ la consommation (Caro J., 1575, Choulhan Arouh TraitŽ YorŽ DŽa 18, 1 et 18, 9).

 

La contention

 

Il nÕexiste pas de rgles halakhiques prŽcises quant ˆ la contention. Toutefois la Shehitat ne pourra se pratiquer sur un animal malade ou ne pouvant se tenir debout (Caro J., 1575, Choulhan Arouh, YorŽ DŽa, 17, 1).

LÕanimal doit tre conscient, ce qui exclue tout Žtourdissement prŽalable. Un dŽcisionnaire contemporain, le Rav Yitzhak Weiss, dans son ouvrage Minhat Ytzhak, chapitre 2, indique que toute anesthŽsie avant abattage rendrait lÕanimal impropre ˆ la consommation.

Enfin, la meilleure position pour pratiquer la shehitat est le dŽcubitus dorsal permettant dՎviter une pression du couteau (Derassa) proscrit par la loi juive.

 

 

4. La Shehitah : le geste technique

 

Le sacrificateur prononce la bŽnŽdiction dŌusage puis il applique son couteau aprs avoir tendu le cuir pour obtenir une incision franche. Le lieu de la shehitat est dŽfini en amont par le larynx, en aval par la bifurcation de la trachŽe (Caro J., 1575, Choulhan Arouh,  traitŽ YorŽ DŽa, 20, 1).

LÕincision doit se pratiquer au milieu du cou (Caro J., 1575, Choulhan Arouh, traitŽYorŽ DŽa 20, 3).

 

Comme indiquŽ ci-dessus, la section de la majoritŽ de lÕĻsophage et de la trachŽe pour les mammifres et de la majoritŽ de lÕun des deux pour les oiseaux est impŽrative (Caro J., 1575, Choulhan Arouh, traitŽ YorŽ DŽa 21, 1). Le geste est un mouvement continu dÕaller et retour et dure 1 ˆ 2 secondes.

LՎgorgement selon les critres halakhiques ci-dessus entra”ne une section inŽvitable dÕautres organes tels que jugulaires, carotides, nerfs vagues, rŽcurrents et sympathiques. Le shohet doit veiller ˆ sÕarrter aux vertbres cervicales sans les toucher de peur dÕendommager le couteau.

 

Cinq  erreurs disqualifient la shehitat :

 

-       SHEHIYA : interruption du mouvement dÕaller-retour (Caro J. 1575, Choulhan Arouh traitŽ YorŽ DŽa 23, 2)

 

-       DERASSA : pression du couteau sur le coup de lÕanimal (Caro J. 1575 Choulhan Arouh traitŽ YorŽ DŽa 23, 11)          

 

-       HALADA : perforation en enfouissement de la pointe (Caro J. 1575 Choulhan Arouh traitŽ YorŽ DŽa 24, 7)

 

-       HAGRAMA : glissement du couteau entra”nant une erreur de localisation (Caro J. 1575, Choulhan Arouh traitŽ YorŽ DŽa 24, 12)       

 

-       HIKKOUR : arrachement de la trachŽe et du larynx de son insertion (Caro J. 1575, Choulhan Arouh traitŽ YorŽ DŽa 24, 15)     

 

Cette rigueur dans lÕacte a pour motivation principale la rapiditŽ dÕexŽcution et la diminution optimale de la souffrance de lÕanimal.

Raison de lÕabattage rituel

La compassion pour lÕanimal un facteur important qui motive lÕacte de Shehitat. Un auteur ancien explique Ē En pratiquant cette section en cet endroit avec un couteau bien effilŽ nous Žpargnons ˆ la bte toute souffrance inutile car la Torah a seulement permis ˆ lÕhomme de consommer la chair des animaux selon ses besoins, mais elle ne lÕautorise pas ˆ faire souffrir lÕanimal Č (Halevy A., 1240). Un auteur contemporain, le Rabbin Ytzhak Weiss reprend cette idŽe et explique que si la shehitat voulait Žviter la souffrance animale alors il est clair que cÕest la meilleure mŽthode pour donner la mort (Weiss Y. 1980).

Abattage rituel et souffrance animale

Objet de nombreux travaux et surtout de nombreux dŽbats, lÕabattage rituel est une mŽthode peu douloureuse en comparaison dÕautres mŽthodes. Le dŽmontrer par des expŽrimentations serait ici hors sujet et nŽcessiterait un trs long dŽveloppement. PrŽcisons simplement que la section des carotides entra”ne une hŽmorragie massive entra”nant une chute de pression artŽrielle dans le systme nerveux central et une mise hors jeu rapide des neurones (se traduisant par la perte de conscience) (Levinger, 1995).

Abattage rituel, hygine et santŽ

La saignŽe massive est un important facteur dÕhygine. DÕautre part, lÕabattage rituel a ŽtŽ un ŽlŽment protecteur face ˆ lÕESB ou maladie de la vache folle. En effet, au cours de cet acte technique, aucun contact nÕa lieu avec la matire cŽrŽbrale, lieu de la prŽsence des prions pathognes.

Les vŽrifications aprs abattage

Aprs lÕabattage, un contr™le ou bediqua est effectuŽ sur les diffŽrents organes. Un grand nombre de pathologies et de sŽquelles de pathologie rendent lÕanimal non cacher (impropre ˆ la consommation).

LÕorgane le plus souvent responsable dÕune mise ˆ lՎcart de la carcasse est le poumon. Toute lŽsion mais aussi toutes adhŽrences tenaces entre les lobes ou avec la paroi costale rendent lÕanimal taref (impropre ˆ la consommation) (Caro J. 1575, Choulhan Arouh, YorŽ DŽa 36).

Une certaine corrŽlation est constatŽe avec les contr™les vŽtŽrinaires. Ainsi, depuis plus de 2000 ans, les Juifs veillent ˆ la qualitŽ sanitaire de la viande.

 

CONCLUSION

Les lois alimentaires ou lois de la cacherout sont des donnŽes fondamentales du juda•sme. Elles participent avant tout dÕune volontŽ de prŽservation identitaire. Une alimentation spŽcifique est pour chaque peuple un ŽlŽment clŽ de sa culture.

Au-delˆ de cela, elles sÕinscrivent dans une volontŽ de transformer les actes humains les plus matŽriels (sÕalimenter) en gestes ˆ portŽe spirituelle. LÕhomme transforme sa table en un lieu dՎdification mais aussi dՎchange avec autrui. Ces lois imposent un choix minutieux de son alimentation. Ainsi lÕhomme nÕest plus un consommateur immŽdiat mais interpose entre lÕaliment et son corps qui va lÕingŽrer une certaine forme de rŽflexion. Au-delˆ de sÕalimenter, les rgles de cacheroute sont un facteur de civilisation. Le respect de lÕanimal en tant que crŽature divine est aussi une notion fondamentale du juda•sme. Toutefois, lÕhomme doit toujours rester au sommet de la CrŽation, il est par essence supŽrieur aux autres crŽatures et doit toujours tre considŽrŽ comme tel. Ne pas tre confondu avec lÕanimal ! Ainsi lÕhomme doit pouvoir utiliser ce dernier lorsquÕun besoin vital sÕimpose (alimentation, santŽ ou animaux dangereux) et uniquement dans ce cas.

Mais lˆ, lÕhomme doit sÕefforcer dÕagir en Žcartant toute espce de cruautŽ. Il semble bien que la shehitat ou abattage rituel pratiquŽ dans toutes les rgles de lÕart prŽsente des garanties de limitation de la souffrance animale.

Respect pour lÕanimal et considŽration de la valeur absolue de lÕhomme, sont les garants dÕune progression souhaitable et possible de lÕhumanitŽ.

Manger cacher cÕest rŽaliser ce dŽfi : Ē Avoir un esprit saint dans un corps sain Č.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RŽsumŽ

 

Chaque SociŽtŽ peut se dŽfinir par son Ē art de manger Č. Les lois alimentaires juives ou lois de la cacherout constituent un des piliers fondamentaux de lÕidentitŽ juive. Ces lois ont des consŽquences hygiŽniques indŽniables, mais leurs motivations sont ailleurs. La table devient un lieu pŽdagogique o lÕhomme apprend et vit un certain nombre de valeurs. Parmi elles, le respect de lÕanimal prend toute sa place. CrŽature divine, sa mise ˆ mort obŽit ˆ un certain nombre de rgles dont le but est de diminuer sa souffrance. Toutefois, lÕautorisation de consommer de la viande permet lՎtablissement dÕune hiŽrarchie entre la bte et lÕhomme qui doit rester au sommet de la crŽation. Les lois alimentaires permettent aussi ˆ lÕhomme de ne plus tre simplement un consommateur mais un tre intelligent donnant une dimension spirituelle mme ˆ lÕacte de manger. Manger Cacher cÕest rŽaliser ce dŽfi

Ē Avoir un Esprit Saint dans un corps sain Č.

 

Mots-clŽs : Lois alimentaires juives Š Cacher.

 

Summary

 

Every society can be defined by its Ē art of eating Č. The jewish eating laws or ŅkosherÓ laws are one of the bases of the Jewish identity. These laws have undeniable hygienic consequences, but their motivations are elsewhere. The table has an educational value where man learns and lives by a set of values. Among these values respect for the animal takes pride of place. Being a divine Creature, the way it is put down has to follow a certain number of rules, the aim of which is to reduce its suffering. However the permission to consume meat enables the setting up of a system of values between the animal and man who has to remain at the top of the creation. Food laws allow man to be not only a mere consumer but also an intelligent being who gives a spiritual dimension even to the act of eating. Eating kosher is the achievement of a challenge :

ŅA holy mind in a sound bodyÓ

 

Key words : Kosher Š Jewish Food Laws.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE

 

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